
Un peu d’histoire
Résistance
Le Fonds de solidarité a été créé en juillet 1940 par un groupe de militants qui allaient former le mouvement socialiste clandestin (M.S.R.), très actif durant toute la guerre et ce malgré la répression de l’occupant.
En 1942, à l’annonce de la mort de René Delbrouck (1903-1942) au camp de Neuengamme et de Georges Truffaut (1901-1942) en Angleterre, deux jeunes hommes politiques liégeois qui venaient de payer de leur vie leur combat contre le nazisme, les dirigeants de la presse clandestine donnèrent ces deux noms à l’œuvre.

Dès 1947, le Fonds de solidarité prit la forme d’une ASBL avec pour objet : « l’organisation des vacances enfantines et la protection des enfants orphelins des fusillés et déportés de guerre ». (Article 3 des statuts du 17 janvier 1947)
En raison des mutations de la société et notamment de nouvelles formes de pauvreté qui exigent d’autres remèdes, l’objet social de l’ASBL a évolué au fil de ses 80 années d’existence.
L’association veut promouvoir l’égalité des chances dans une société plus ouverte et solidaire. Son action, guidée par un idéal de paix et de démocratie, poursuit la lutte contre le racisme et le fascisme qui a conduit à sa fondation.
L’association a pour objet, à l’exclusion de la poursuite de tout gain matériel, l’aide à tout enfant victime des inégalités sociales et fréquentant l’enseignement public.
Article 4 des statuts du 1er avril 2022
Georges Truffaut
Georges Truffaut nait à Liège le 22 décembre 1901. Sa carrière professionnelle débute comme secrétaire de rédaction au journal La Wallonie, où il défend ses convictions socialistes, wallonnes et antifascistes. Il devient le secrétaire de l’Union socialiste communale de Liège, préside la section Liège Namur du Syndicat des employés. Simultanément, en tant que figure marquante de la Ligue d’Action wallonne dont il est un des fondateurs, il écrit d’abondants et retentissants articles dans le périodique du même nom, l’Action wallonne.
Engagement politique
Conseiller communal socialiste en 1932, il devient échevin des travaux publics en 1935, puis député de Liège en 1936. En tant qu’échevin des travaux publics, il est à l’origine de la construction, entre autres, du lycée Léonie de Waha ou des bains de la Sauvenière, devenus aujourd’hui la Cité Miroir. On lui doit aussi la fondation du port autonome de Liège et la mise sur pied de la Grande Exposition internationale de l’Eau de 1939.
En 1938, il crée l’Association le Grand Liège, dont il est le premier président. Elle est destinée à garantir la cohésion entre les forces vives liégeoises et à assurer le rayonnement de la métropole.
Georges Truffaut est également député, membre de la Commission des Finances. Il réfute les remèdes des gouvernements en place pour enrayer la dépression économique : déflation et dévaluation (1934-1936). Ses contre-propositions visent à assujettir les institutions financières aux pouvoirs publics.
La question wallonne l’interpellera toute sa vie. Avec Fernand Dehousse, il prépare un projet de réforme de la Constitution visant à transformer la Belgique en un Etat fédéral. Ce texte est déposé à la Chambre le 1er juin 1938, avec sa signature, celle de Joseph Martel et de François Van Belle. On y prône le fédéralisme à trois régions (Wallonie, Flandre et, au moins, l’arrondissement de Bruxelles) qui remplacent les provinces, la fixation définitive de la frontière linguistique par des référendums au niveau des communes, la parité Wallons/Flamands à la Chambre fédérale. Les régions perçoivent les impôts et ont pour compétences l’enseignement, la législation sociale et industrielle, les travaux publics, les eaux et le maintien de l’ordre. Il faut soumettre le choix de la politique étrangère au vote d’une majorité des deux tiers du pays…
Le bruit des bottes
Georges Truffaut s’oppose violemment à la politique de neutralité du Gouvernement, qui souhaite se tenir à égale distance de la France, de l’Angleterre et du régime nazi, ce qui implique des concessions à l’extrême droite et au mouvement nationaliste flamand. Il combat la décision proclamée en 1936 par Léopold III de rompre les accords avec les alliés de 1914-1918 en faveur d’une politique d’indépendance. Le choix d’une neutralité intransigeante pour répondre à la menace nazie provoque la multiplication de ses mises en garde. Il démontre l’inéluctabilité d’une agression hitlérienne dont la Wallonie sera la première victime.
Fin des années 1930, impuissant à convaincre le pouvoir politique de la nature criminelle du nazisme, il réclame sa réintégration à l’armée. Il aurait dû devenir bourgmestre de Liège, mais on lui communique ce vœu du Conseil communal liégeois alors qu’il est déjà mobilisé comme capitaine de l’armée belge.
En mai 1940, après la défaite de l’armée belge, il rejoint Londres où il remet aux autorités anglaises et à Winston Churchill un memorandum visant notamment à faire revenir de France les unités combattantes belges. Ce sera réalisé en 1943 avec les Forces belges de Grande Bretagne ou la Brigade Piron.
Un autre projet exposé dans son mémorandum à Churchill se base sur une information secrète : l’existence à Dakar de deux cents tonnes d’or monétaire de la Banque nationale de Belgique. Il y a, affirme-t-il, nécessité de reprendre possession du pactole afin de le faire contribuer aux besoins de la guerre. Truffaut réussit à se faire mandater par le Secrétaire d’Etat aux Colonies britanniques, Lloyd George, et par Camille Gutt afin de conduire une mission en Afrique, en Gambie, du 19 août au 23 octobre 1940. Il en ramène des documents comptables qui baseront l’action en justice internationale aboutissant à la récupération par la Belgique de son stock d’or.
À son retour au Royaume-Uni, la donne a changé. Lors de la réunion des quatre ministres reconnus dans le camp allié en tant que gouvernement légal de la Belgique occupée, la distribution des cartes n’est guère favorable à Truffaut. Il y a là un Wallon catholique (Hubert Pierlot), un Flamand CVP (Albert de Vleesschauwer), un financier sans parti (Camille Gutt) et un Bruxellois socialiste (Paul Henri Spaak). Truffaut avait âprement combattu leur politique…
Son métier militaire l’éloigne d’ailleurs de Londres. Commandant d’une compagnie squelettique, il va de cantonnement en cantonnement militaire, s’efforce quand même d’entraîner ses soldats. Il côtoie des officiers qui le narguent, disant que l’armée ne se battra que pour le Roi et le maintien de l’ordre en Belgique. Il dénonce aux ministres les dysfonctionnements et les lenteurs par le moyen d’une intense correspondance. Ceux-ci minimisent.
La liaison avec Liège a pu être maintenue en mai 1941 par son Discours aux Liégeois diffusé par la BBC, mais un texte destiné aux Wallons pour les fêtes de septembre ne franchit pas les exigences de la censure.

Le 3 avril 1942, un étrange exercice de lancer de grenades à Hereford dans le Pays de Galles provoque la mort accidentelle du capitaine Truffaut.
René Delbrouck
René Delbrouck naît à Ougrée le 13 décembre 1903. Secrétaire des Jeunes Gardes socialistes de l’arrondissement de Liège dès 1932, il devient député en 1936.
Soldat milicien de la classe 1923, il tente de rejoindre l’armée belge en 1940, mais les évènements ne tardent pas à le ramener au pays. On le retrouve siégeant en qualité de Conseiller à la première assemblée du Conseil Communal en juin 1940. Le 23 août de la même année, il est nommé échevin.
À la réunion du 22 avril 1941, le collège échevinal d’Ougrée reçoit notification de l’Oberfeldkommandantur : monsieur René Delbrouck ne peut plus exercer ses fonctions d’échevin.
René Delbrouck se voue sans tarder à la résistance contre l’occupant et il publie fin 1940 le premier journal interdit du pays. Le Clandestin est tiré à plus de 2000 exemplaires. Ensuite, avec le linotypiste liégeois Charles Rahier, il crée un nouveau journal clandestin, qui deviendra Le Monde du Travail.
René Delbrouck appelle les travailleurs à chômer le 1er mai 1941. Il s’agit donc d’un appel à la grève.
Arrêté par les nazis, le 22 juin 1941, René Delbrouck est d’abord détenu à la forteresse de Huy, puis transféré au camp de Neuengamme. Il y meurt l’année suivante, le 20 juin 1942.
