Plans de lutte contre la pauvreté

À différents niveaux de pouvoir, des plans de lutte contre la pauvreté ont été définis, mis en œuvre et évalués ces dernières années.

 

Au niveau européen

La lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale est l’un des objectifs spécifiques de l’Union et de ses États membres dans le domaine de la politique sociale. Depuis le traîté de Lisbonne (2000), des mécanismes de contrôle et de coordination ont vu le jour : il fallait établir des objectifs, mesurer la pauvreté grâce à un ensemble d’indicateurs et de valeurs de référence, puis formuler des orientations à l’attention des États membres et stimuler des plans d’action nationaux pour lutter contre la pauvreté. Nous, simples citoyens, trouvons cela fort abstrait, et les résultats se font souvent attendre.

La stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive, adoptée en 2010, a fixé un nouvel objectif commun dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale : réduire de 25 % le nombre d’Européens vivant au-dessous du seuil national de pauvreté et sortir plus de 20 millions de personnes de la pauvreté. Cet objectif n'est que très partiellement atteint, mais les décisions politiques à ce niveau ont l'avantage indéniable de fixer un cadre clair aux actions à entreprendre.

Ainsi, le socle européen des droits sociaux définit trois axes prioritaires : égalité des chances et accès au marché du travail, conditions de travail équitables, protection sociale et inclusion sociale. Le Fonds social européen (FSE) constitue le principal instrument de cofinancement d’actions visant à lutter contre les discriminations et à aider les personnes les plus défavorisées à accéder au marché du travail.

 

Au niveau fédéral

Le troisième Plan fédéral de lutte contre la pauvreté (2016-2019) devait – pour atteindre l'objectif fixé par l'Europe – faire diminuer le nombre de personnes pauvres en tablant sur six stratégies : assurer la protection sociale, réduire la pauvreté infantile, améliorer l'accès à l'emploi, lutter contre le sans-abrisme et les logements précaires, garantir le droit à la santé et rendre les services publics plus accessibles aux personnes vulnérables.

La Belgique n'a pas atteint son objectif. Le risque de pauvreté ou d’exclusion sociale est demeuré plus ou moins stable entre 2008 et 2018.

  • La proportion des Belges vivant dans la pauvreté monétaire a légèrement augmenté au cours de ces dernières années.
  • La privation matérielle grave est plus faible que la moyenne européenne. La Belgique occupe la 13e place du classement 2017 des 28 états membres, mais tous les pays voisins obtiennent de meilleurs résultats pour cet indicateur.
  • Le troisième indicateur pour mesurer la pauvreté est celui des ménages à très faible intensité de travail. C'est pour cet indicateur que la performance de la Belgique est la plus mauvaise, malgré une légère amélioration, due tout simplement à la croissance économique récente qui a fait progresser à la hausse le taux d'emploi.

Le rapport d'évaluation du Plan fédéral pointe aussi le fait que les personnes directement touchées par la pauvreté et l'exclusion sociale ne sont pas suffisamment entendues : les personnes vivant dans la pauvreté, les associations dans lesquelles les pauvres s’expriment et d’autres acteurs, ont un rôle primordial dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de la politique, qui est insuffisamment pris en compte dans ce plan.

 

Au niveau régional

Le premier Plan wallon de lutte contre la pauvreté, adopté en 2015 et mis à jour en 2018 part de deux constats. D’une part, le taux de risque de pauvreté ou d’exclusion sociale en Wallonie reste à un niveau préoccupant, de l’ordre de 26 % de la population, alors qu’en moyenne pour le pays, il est de 21 % (environ 15 % en Flandre et 38 % en région bruxelloise). D’autre part, la situation est particulièrement grave pour environ 8.3 % de la population en Wallonie, qui vit dans un ménage en situation de déprivation matérielle sévère.

Le Plan a été élaboré sur base d'un diagnostic de la situation wallonne qui a été établi en s’appuyant à la fois sur une importante phase de consultation des acteurs tant associatifs que publics et sur un groupe de travail constitué de différentes administrations wallonnes, du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP) et de l’IWEPS. C’est en partenariat avec ces différents acteurs que les thématiques prioritaires du plan ont été définies.

Le Plan actualisé en mars 2018 est structuré en 3 axes :

  • sortir de la pauvreté (emploi et formation) ;
  • agir contre la pauvreté au quotidien : logement, alimentation, énergie, eau, santé, politiques familiales, mobilité, tourisme, numérique ;
  • mesures transversales (accès aux droits, démarches partenariales et gouvernance).

L'évaluation du plan a été confiée à l'IWEPS (Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique), qui a publié en mai 2019 des rapports portant sur trois volets précis : les maisons médicales, le logement et l’aide alimentaire.

  • Le rôle que jouent les maisons médicales dans l'accès aux soins de santé est important, mais les mesures du Plan qui concernent ces structures existaient déjà. On ne peut donc pas parler d'une ambition  supplémentaire en termes de lutte contre la pauvreté.
  • Le développement d'expériences de sécurisation du paiement des loyers prévu par le Plan wallon visait à faciliter l'accès à un logement locatif privé décent et à un prix raisonnable pour des publics aux revenus plus modestes. Elle n'a pas été mise en place. Pourquoi ? Certains de ces dispositifs nécessitaient que les locataires acceptent qu’un tiers paie le loyer à leur place en prélevant sur leurs revenus. Cette modalité n'a pas vraiment été appréciée par les personnes précaires…
  • Les colis alimentaires deviennent nécessaires à des catégories de plus en plus larges de la population mais cette aide constitue juste une béquille permettant temporairement de faire face à d'autres besoins fondamentaux (logement, soins de santé…). L'aide alimentaire ne suffit pas à combattre la pauvreté et il ne faudrait pas que le focus sur cette aide nous fasse oublier que des politiques structurelles restent nécessaires pour assurer l'accès au logement, à l'énergie, à des revenus suffisants pour vivre, etc.

 

Sources :
La lutte contre la pauvreté, l’exclusion sociale et les discriminations [Fiches techniques sur l'Union européenne, Parlement européen : 2020]
Rapport d’évaluation. 3e Plan fédéral de lutte contre la pauvreté 2016-2019 [SPF Intégration sociale : juillet 2019]
Le Gouvernement wallon évalue son Plan wallon de lutte contre la pauvreté [Gouvernement wallon : mai 2019]
Rapports d’évaluation du Plan wallon de Lutte contre la Pauvreté [IWEPS : mai 2019]